Conscientomètre

Le mariage forcé
Selon l’ONU, 12 millions de filles sont mariées de force chaque année dans le monde. Cette estimation est en dessous de la réalité, car elle ne comptabilise ni les femmes majeures ni les garçons et les hommes.
Si tu n’as pas fait le choix de te marier ou que ton refus du mariage n’est pas respecté par ton entourage, avant ou après le mariage, c’est un mariage forcé.
- Le mariage forcé ne s’exerce pas dans une culture ou une religion particulière, et concerne des personnes de tous les milieux sociaux.
- Les victimes de mariage forcé sont aussi des garçons, bien que ce soit plus rare.
- La pratique du mariage forcé va à l’encontre de la liberté de conscience et s’inscrit dans un continuum de discriminations et de violences sexistes, racistes, psychologiques, physiques et sexuelles.
- En France et dans la majorité des pays, le mariage est interdit sans le consentement libre et éclairé de chacun.e des futurs époux. Pour rappel, céder n’est pas consentir.
Pressions, discriminations et restrictions de liberté
Lorsqu’on refuse de se marier, la famille exerce des pressions pour culpabiliser et rejeter la responsabilité sur la personne concernée. Quand celle-ci continue de s’opposer au mariage forcé, la famille exerce du chantage affectif, des menaces, elle nous interdit d’aller à l’école ou à la fac, de travailler, de voir nos ami.e.s ou de communiquer avec les membres de notre famille opposés au mariage. Cela entraîne une perte de confiance en soi et envers les autres pouvant détruire les repères et l’autonomie affective. Les pressions exercées par la famille pour nous faire céder, nous exposent à des risques de conflits et de violences voire de rupture avec l’entourage ainsi qu’à une détresse psychologique, car on ne souhaite ni se soumettre au mariage, ni rompre avec sa famille. Pour autant en France et ailleurs, les concerné.e.s résistent en s’éloignant provisoirement de leur famille et parviennent à échapper au mariage forcé.
Face à l'impact du mariage forcé : la résistance des concerné.e.s
En plus des souffrances psychologiques, le mariage forcé implique des violences physiques, des viols, des grossesses non désirées et précoces, des atteintes graves à notre liberté de construire notre autonomie, notre avenir professionnel, notre vie affective ou conjugale. Ces multiples violences dégradent fortement et durablement notre santé et impactent toute notre vie. C’est pourquoi nous avons le droit de résister face à un mariage forcé. Personne n’a en revanche le droit de juger une jeune qui est obligée de fuir sa famille, parfois sa ville, sa région ou son pays, pour se mettre en sécurité, c’est en effet le seul moyen pour que cessent d’une part le mariage forcé et toutes les humiliations et violences, d’autre part, c’est le mode de résistance de milliers de jeunes qui veulent préserver leur choix de vie.
Difficultés matérielles
Le mariage forcé est une violence précarisante. On porte la charge de la preuve du danger que l’on encourt et l’on est confronté.e à un parcours difficile afin de trouver un hébergement d’urgence, un lieu d’accueil provisoire ou un appartement, de poursuivre nos études, de bénéficier de soins médicaux, ou encore d’obtenir ou de ne pas perdre notre titre de séjour. Ce parcours de la combattante peut mener à une précarité administrative et financière. C’est un facteur de vulnérabilité, mais des solutions existent.
Conseils pratiques pour se protéger
- Faire connaître sa situation à un proche, un.e ami.e, un.e professeur.e, un.e psychologue, un.e éducateur·rice, un.e assistant.e social.e, ou toute personne de confiance.
- Photocopier ou scanner tous les documents importants (carte d’identité, passeport, titre de séjour, certificats de scolarité, etc.). Les transmettre à une personne de confiance ou une association.
- En cas de confiscation ou de destruction des papiers, faire une déclaration de perte ou déposer plainte pour vol contre X (personne non dénommée) si vous ne souhaitez pas nommer les personnes.
- En cas de départ vers l’étranger, que l’on soit mineure ou majeure, il est possible d’obtenir une interdiction de sortie de territoire et d’être protégée dans un lieu dont l’adresse sera secrète, avec l’accord et l’aide de la Justice. Nos parents n’iront pas en prison et ne seront pas informés de notre adresse.
En cas de départ précipité à l’étranger, il est conseillé de demander de l’aide à la Police de l’Air et des Frontières (PAF) située dans chaque aéroport et port. Il existe aussi des stratégies discrètes comme celle de mettre un objet métallique dans nos sous-vêtements (qui fera sonner le portique généralement au moment du contrôle du passeport). Il permet de pouvoir parler en tête-à-tête avec un.e policier.e avant de monter dans l’avion ou le bateau.Si le départ n’a pas pu être empêché, il n’est pas trop tard. Les ambassades et consulats de France peuvent faciliter un rapatriement à la double condition que la personne soit majeure selon la loi en vigueur en France (18 ans) et dans le pays où elle se trouve (18 ans à 21 ans selon les pays).
Dans tous les cas, demandez de l’aide pour obtenir des informations sur ces mesures de protection et de stratégies discrètes.
Ce que dit la loi
La loi française et celles de la quasi-totalité des pays du monde exigent le consentement des deux époux à leur mariage. Si l’un des deux époux a été contraint, le mariage dit « forcé » peut être annulé dans un délai de 5 ans à compter du mariage. Pour les mineur-es, la nullité du mariage est automatique.
La loi française reconnaît les violences psychologiques, physiques et sexuelles ainsi que les atteintes à l’intégrité dont certaines sont des crimes, comme par exemple le viol. Certaines infractions sont assorties de circonstances aggravantes si elles sont commises dans le contexte d’un mariage forcé. Le droit français sanctionne également les stratagèmes perpétrés pour convaincre un.e jeune de se rendre à l’étranger, sans l’informer qu’un mariage forcé est organisé à son encontre. La loi française prévoit également des mesures de protection, sous certaines conditions, que la victime soit en France ou à l’étranger.
Protéger une personne concernée par le mariage forcé
- Si la personne semble inquiète, angoissée, ou se comporte différemment, il est essentiel de l’écouter et de prendre au sérieux ces signes.
- Définir un mot ou une phrase que la personne peut utiliser en cas de violences, mais qui soit “passe-partout” au cas où la personne serait écoutée ou surveillée.
- Si un départ à l’étranger est prévu, réunissez les éléments suivants : la destination et la date du voyage, les photocopies des documents d’identité de la personne concernée, l’adresse de destination. Transmettez ces éléments à une association ou un professionnel de confiance, en mettant le Ministère de l’Europe et des affaires étrangères (MEAE) en copie.